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Théa Nougaro : « Claude était habité par une âme d’artiste, au plus profond de lui »
La fille du célèbre auteur et chanteur toulousain lève un coin de voile sur un père tant aimé et admiré, mais aussi tellement absent. Toute en finesse, en émotion et en dignité, Théa nous parle de Claude, artiste et homme généreux et sensible, adoré de tous.
Ré à la Hune : Quel est votre attachement à l’île de Ré ?
Théa Nougaro : Depuis mon enfance je viens passer l’été dans la maison familiale des Portes, celle de mes grands-parents qui ont d’abord acheté des dunes, puis construit cet endroit, j’y suis très attachée. Claude, mon papa, y venait de temps en temps, parce que c’était chez ses parents, mais ce n’était pas son lieu favori, même s’il l’inspirait. C’est lorsqu’il est venu avec Marcia, sa seconde femme, qu’il a regardé l’île de Ré avec des yeux d’amoureux, son lien avec cette terre s’est éclairci, à travers sa muse, la femme qu’il aimait.
Beaucoup d’hommages ont été rendus à votre père, celui qui se prépare à La Java des baleines a-t-il une saveur particulière pour vous ?
Chaque évènement est important, du plus petit au plus grand, pour raviver la flamme et toujours le célébrer, ce sont toujours des moments intimes et très forts. Pour cet évènement en particulier, du fait de mon amour pour l’île de Ré, je ne pouvais qu’accepter et m’impliquer, participer à la proposition et donner des idées.
J’ai un lien profond avec cette maison dont il m’a fait cadeau. J’y ai découvert un dessin de lui sur un mur qui était recouvert de papier peint, une femme allongée, des pleins, des déliés, un oeil… Je l’ai fait encadrer.
C’est un talent de mon père qu’on ne connaît pas. Au-delà du poète et de l’interprète, c’était aussi un grand dessinateur. J’aimerais que l’exposition de ses dessins qui existe déjà, soit pourquoi pas présentée ici, sur l’île, un jour.
Les propriétaires de la Java des baleines souhaiteraient faire de cet hommage un évènement pérenne, qui reviendrait chaque année, tout est donc à construire et ils sont ouverts à beaucoup d’idées.
Quel style de dessins affectionnait- il ?
Il dessinait beaucoup, sur des paper-board au marqueur, il ajoutait à ses dessins des aphorismes, pas mal de ses dessins comportent des extraits de pensée, juste un titre, ou des paroles qui l’inspiraient. Il était très doué pour le dessin. Beaucoup de personnes qui ont pu observer ses oeuvres font le parallèle avec Picasso et Cocteau.
Comment s’est construite la programmation des deux jours de festival à la Java des baleines ?
J’ai contacté des personnes que je trouvais légitimes, qui ont travaillé autour du répertoire de mon papa. J’ai appelé Mouss & Hakim à qui ma tante a confié sept textes inédits de papa que nous avons trouvés dans des carnets, dont ils ont fait un album intitulé « Les Darons de la Garonne », qu’ils ont accepté de venir chanter le 6 août, enchantés de ne pas être trop loin à ces dates, car ils sont en tournée cet été. Nous avons par ailleurs sélectionné des audios et vidéos, nous devons encore travailler l’événement avant les jours J.
Laurent Balandras auteur, entre autres de « Claude Nougaro, l’intégral : l’histoire de toutes ses chansons », édité en 2014, sera présent pour répondre avec moi aux questions de François Pécheux, vendredi 5 août au soir. L’échange sera ponctué en musique par Mouss, Hakim, leurs musiciens et Béesau un jeune trompettiste virtuose éclectique et Rétais de coeur.
Vous avez édité deux livres, dont l’un pour les enfants, quelle a été votre démarche ?
Le premier « J’entends encore l’écho de la voix de papa », édité en 2014, est un ouvrage très personnel, qui m’a permis d’achever la transition du lien filial. L’autre est un livre-CD illustré présentant douze textes, conçu pour faire découvrir Claude Nougaro aux enfants. Il a écrit énormément de chansons qui ressemblent à des fables, à de petits contes musicaux. En ayant beaucoup échangé avec ma fille, quand elle était petite, sur le sens des textes, la morale de chaque histoire, j’ai eu envie de faire comme un livre de contes que les parents lisent à leurs enfants. J’ai cherché un éditeur jeunesse, ainsi que onze illustrateurs, un par texte, pour que le procédé graphique et la patte de chacun corresponde le mieux à chaque texte, à son titre et à son ambiance, laissant à l’enfant le soin de devenir le 12e illustrateur du livre. Ce livre a aussi reçu un très bon accueil.
Je ferai une séance dédicace de mes deux livres vendredi 5 août à La Java des baleines, en début de soirée.
Le Claude Nougaro public et sur scène était-il très différent de l’homme en privé ?
C’était avant tout un artiste, celui qu’on avait à la maison était le même que le musicien sur scène, il était habité par une âme d’artiste au plus profond de lui. France 3 a diffusé à cet égard un documentaire magnifique de Thierry Guedj au printemps dernier, intitulé « La vie rêvée de Claude Nougaro », qui révèle le Claude Nougaro intime avec une grande justesse.
A-t-il eu une vie heureuse ?
Avec le recul, oui il a pu vivre de sa passion. C’était un homme en perpétuelle quête de bonheur, qui a vécu des phases très sombres, alternant avec des moments de lumière sur scène. Il était vraiment très habité par son art, il écrivait tout le temps, était toujours dans le doute, régulièrement traversé par des moments de dépression.
Dans votre premier livre, vous transcrivez vos ressentis d’enfant avec des mots très poignants, êtes-vous aujourd’hui apaisée ? Et que vous renvoie le public de Claude Nougaro ?
Oui le livre m’y a aidé. Il y a eu des périodes où j’avais le sentiment d’être dépossédée de mon père par son public, plusieurs moments que nous aurions dû vivre dans l’intimité nous ont été volés, comme une partie de mon enfance. Papa a aussi fait de moi une personne un peu plus forte et riche grâce à une transmission exceptionnelle.
Toutes mes rencontres avec son public me confirment à quel point il était aimé, je reçois beaucoup de témoignages de gens qui aimaient autant l’artiste que l’homme. Le sentiment prévalant chez tous ceux qui l’ont côtoyé, ne serait-ce que fugacement, est qu’ils se sont sentis élevés par lui. Il donnait de l’importance à chacun, tous se sentaient grandis d’avoir rencontré quelqu’un d’exceptionnel et très simple à la fois. Il était dans le respect, la tolérance et faisait preuve d’une grande générosité humaine.
Avez-vous d’autres projets pour faire vivre la mémoire de Claude Nougaro ?
Ma soeur Cécile a ouvert en 2009 une péniche « La maison Claude Nougaro » à Toulouse, elle a passé beaucoup de temps et fait preuve d’énormément d’énergie avec son équipe pour concrétiser ce projet. Pour ma part, j’ai encore des projets, j’y tiens, c’est à nous, sa famille, sa femme, sa soeur, ses enfants, de faire vivre sa mémoire, au travers d’expositions, d’évènements et bien d’autres choses que je ne dévoile pas à ce stade de projet. Cela nous tient vraiment à coeur à tous les quatre ses enfants, Cécile, Fanny, Pablo et moi de faire en sorte qu’on le célèbre, avec qualité et talent, afin qu’il reste toujours présent.
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