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La prévention au coeur de la protection de l’enfance
Jeudi 20 novembre, à l’occasion de la Journée internationale des droits des enfants, “Les Rencontres du social” consacraient une journée à la protection de l’enfance avec pour invitée d’honneur, la conférence familiale.
« Agir ensemble autrement »
Organisées conjointement par la Communauté de Communes et le Département de la Charente-Maritime, ces rencontres réunissent, deux fois par an depuis quatre ans, les acteurs du social autour d’une thématique forte, dans un but d’échange et de sensibilisation. Comme le constate Brice Samson, directeur du Pôle “Services à la population” à la CdC de l’île de Ré, « élus, professionnels et bénévoles des associations n’ont pas toujours le même vocabulaire. Il s’agit d’élaborer une culture commune afin de mieux travailler ensemble. » L’intitulé de cette huitième édition donne à entendre l’ambition de ses organisateurs : « Agir ensemble autrement ». Interrogée sur l’état des lieux de la protection de l’enfance dans le département de la Charente-Maritime, Mylène Rémi, déléguée territoriale de l’assistance sociale, rapporte un total de 1609 évaluations en 2025, un chiffre en constante augmentation. « Cela vient de ce que la parole se libère, à l’intérieur des familles et dans les cercles proches », explique-t-elle.
L’île de Ré a cependant un statut particulier : dans notre microcosme insulaire où tout le monde se connaît, il est plus difficile de signaler une situation préoccupante. « Lorsque l’information remonte jusqu’à nous, il arrive que la situation soit trop dégradée pour être sauvée. » D’où l’importance de communiquer sur le rôle des services sociaux. A ce sujet, Nathalie Echantillon, directrice adjointe de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), remarque la persistance des clichés : « Les gens associent assistance sociale et placement. En réalité, cela reste marginal. » « Seule une situation grave conduit à un placement », renchérit Brice Samson. « Les travailleurs sociaux sont d’abord des soutiens à la parentalité. Ils ne sont pas là pour stigmatiser les parents, mais pour les accompagner. »
Redonner le pouvoir aux parents
La conférence familiale, présentée en première partie de journée, fait partie des ressources dont disposent les acteurs du social dans leur travail de prévention. Avant qu’une équipe des Deux-Sèvres ne vienne témoigner de son expérience sur le terrain, Brice Samson a fait appel à la compagnie Kitsune, spécialisée dans le théâtre interactif, pour mettre en scène une situation critique et sa résolution. Sur scène, Zoé, 13 ans, s’oppose à sa mère Valérie, avec laquelle elle vit seule. Entre elles, la communication est rompue, toute conversation dégénère en conflit. A la fin de la deuxième scène, les comédiens s’interrompent. Brice Samson reprend la main : « Que pensez-vous de ce qui vient de se passer ? » Ces « arrêts sur image » permettent à chacun de s’approprier la problématique et d’enrichir ensuite les échanges avec les professionnelles.
D’origine néo-zélandaise, la conférence familiale s’inspire d’une méthode de résolution des conflits de la communauté Maori qui redonne aux parents le pouvoir d’agir, soutenus par l’environnement proche. Les besoins de l’enfant sont au coeur d’un dialogue dans lequel interviennent des personnes ressources, qui peuvent être aussi bien des membres de la famille que des voisins ou, dans le cas de Zoé, son professeur de volley. Dans les Deux-Sèvres, après une première campagne concernant cinq agents du service social, ce sont vingt travailleurs, tous services confondus, qui se sont formés à la conférence familiale en 2021. Florence, venue de l’Éducation, en fait partie. Elle témoigne de ce que, souvent, les enfants prennent eux-mêmes en charge l’organisation de la conférence et la mènent à son terme, c’est-àdire à l’établissement d’un plan d’action pour l’enfant. Elle explique : « Autant d’adultes réunis pour eux, cela n’arrive jamais ! » « Ce n’est pas de la magie », prévient-elle cependant. « Mais cela apaise beaucoup de tensions et recrée du lien entre les membres de la famille dès la préparation. » Et d’ajouter : « Et puis quelquefois, c’est magique. »
La conférence familiale, connue depuis vingt ans en France, est encore peu utilisée. Seize départements à ce jour l’ont incluse dans leurs ressources.
Des outils à disposition
Dans un deuxième temps, cette journée a permis à l’UDAF de présenter trois outils mis à disposition des familles et des professionnels sur notre territoire : le parrainage de proximité, la médiation familiale et les groupes de parole.
Dans le premier cas, le parrainage de proximité fait appel à des parrains et des marraines bénévoles qui ont pour mission de créer un lien affectif et de confiance avec des enfants mineurs, y compris de l’ASE. Aujourd’hui, vingtdeux parrainages sont en cours sur le Département, et six enfants sont en attente d’un parrain ou d’une marraine. « Il y a beaucoup de demandes », a détaillé Hélène Njifenjou, la directrice du pôle accompagnement et soutien de l’UDAF. « C’est un outil qui fonctionne très bien. Quand le dispositif prend fin à la majorité des enfants, on voit souvent des parrainages qui se poursuivent officieusement. Ce sont des familles qui s’élargissent. » Ces conventions de parrainage sont très encadrées, via une Commission qui valide chaque dossier et suit l’évolution de chaque « binôme ». Signées pour un an, elles peuvent être reconduites autant de fois que le parrain/ marraine et l’enfant en font la demande.
La médiation familiale, quant à elle, permet à des familles en grande difficulté de communication de retrouver un terrain d’entente et de renouer le dialogue. Il peut s’agir de parents avec leur ado, ou de deux parents séparés ou en voie de séparation. Ces médiations sont proposées par des médiatrices de l’UDAF, dans le cadre de médiation conventionnelle ou mandatée par des juges aux affaires familiales. « Elles se déroulent pour beaucoup à notre siège de Lagord », a expliqué la responsable parentalité de l’UDAF Valérie Clochard- Grandon, « mais nous avons aussi la possibilité d’en accueillir à la mairie de Saint-Martin-de-Ré, et nous allons réfléchir à la mise en place de permanences sur l’île de Ré. »
Enfin, les groupes de parole permettent de mettre en lien des parents qui rencontrent les mêmes difficultés. « Ces groupes se réunissent une fois par mois pendant six mois. En ce moment sur La Rochelle, nous avons un groupe dédié aux enfants de parents handicapés, et un autre aux parents séparés », a détaillé Delphine Kerisit, médiatrice familiale à l’UDAF. « Pour certaines personnes, ces groupes sont plus accessibles que la médiation, moins effrayants. Ils permettent bien souvent, en entendant des paroles différentes, de faire bouger les lignes et peuvent être une première étape permettant ensuite une médiation. » Des groupes de parole sont aussi proposés aux enfants âgés de 6 à 11 ans qui vivent une séparation, leur permettant dans un cadre sécurisé d’exprimer leurs émotions et de partager leurs questionnements avec d’autres enfants de leurs âges.
UDAF de Charente-Maritime, 5 rue du Bois d’Huré à Lagord. 05 46 98 26 41.
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