Pour la protection des arbres
L’abattage de six cupressus vénérables dans une propriété privée du Bois-Plage est-il celui de trop ? Il conduit en tous cas à la création d’un collectif citoyen.
Samedi 5 février au Bois-Plage, salle des Eridolles. Sous la houlette de l’association Ré Ensemble Autrement et de sa présidente Marie-Hélène Scotto, se tient une première réunion citoyenne en vue de créer un collectif autour des arbres, avec la complicité de l’ex-candidate EELV aux élections départementales Judith Jahiel-Hébert. Quoi, pourquoi, comment ? Décryptage d’une initiative.
Rappel du contexte
Après le « pin de La Maline » à La Couarde, au destin pour l’heure suspendu, la grogne s’est élargie au Bois- Plage, et sur les réseaux sociaux où ont été diffusées, via un groupe insulaire bien connu, des images montrant le 19 janvier dernier, l’abattage d’immenses cupressus situés dans un jardin privé.
Rien ne sert de nier le sujet : de plus en plus de personnes montrent leur attachement aux arbres, n’hésitant plus à exprimer leur désaccord sur leur abattage. Même réaction du côté de Saint-Martin où des arbres centenaires ont récemment été abattus place de la République. Exemples non exhaustifs mais marqués d’une certaine actualité.
Voilà qui mène une dizaine de personnes (c’est peu il est vrai mais c’est une première), à se réunir pour la première fois sur le sujet.
Un collectif apolitique
Revenant en introduction sur l’affaire des cupressus, l’écologiste précise avec plaisir que l’un d’entre eux a été sauvé. « En fait les bûcherons n’avaient pas envie de le couper et une discussion a permis sa sauvegarde », explique-t-elle. Bonne nouvelle.
Avant de poursuivre son propos, Judith Jahiel-Hébert tient à préciser claire- ment que cette initiative de collectif est « parfaitement apolitique ». Ce qui autorise l’un des participants à demander à Véronique Richez-Lerouge, présente à la réunion, de ne pas intervenir en tant que telle. « Je suis aussi une citoyenne », se défend la Conseillère départementale, précisant qu’elle est là à ce titre, sans omettre d’ajouter que « suite à l’histoire du pin de La Maline, le sujet est de toute façon entré dans la sphère politique. C’est un sujet d’intérêt général », argumente-t-elle.
Un périmètre défini
Le collectif porté par l’association Ré Ensemble Autrement s’est donné comme champ d’action « les arbres et haies en zones habitées », excluant de fait les zones naturelles boisées. C’est donc au sein des communes, sur les espaces publics mais aussi privés, que le collectif souhaite défendre la cause des arbres, leur sauvegarde et leur pré- servation, sans omettre toutefois « le respect des libertés », précise Judith Jahiel-Hébert. « Comment agir avec respect des intérêts et des envies des uns et des autres, tout en protégeant les arbres ? ». Telle est la question et sa réponse n’est pas évidente, loin s’en faut.
Vide juridique ?
Lors de l’affaire des cupressus, Marie- Hélène Scotto a pu par elle-même constater un fait. Accompagnant les citoyens mobilisés à la Mairie du Bois-Plage pour rencontrer les élus, elle constate que ceux-ci, même lorsqu’ils n’approuvent pas les démarches d’abattage privées, ne disposent pas toujours d’outils juridiques appropriés. En effet, la loi régissant la propriété privée autorise l’abattage d’un arbre, avec quelques exceptions toutefois, soumettant l’opération à autorisation préalable.
Ajoutons également que le cadre, légal lui aussi, du PLUi est un outil de maîtrise et de contrainte, sous réserve que les arbres aient été, au préalable, recensés de manière à y être inscrits. Une porte d’entrée que l’association Ré Ensemble Autrement souhaite ouvrir plus largement.
Deux axes de travail
Judith Jahiel-Hébert et Marie-Hélène Scotto proposent ainsi à l’assistance deux orientations distinctes. La première, centrée sur le territoire se propose justement d’effectuer un recensement plus complet des arbres n’ayant pu, le travail étant énorme, être distingués pour leur intégration au PLUi.
Faisant appel à la bonne volonté citoyenne, les deux femmes demanderont donc à ceux qui le souhaitent de s’engager dans cette mission, en prenant des photos des spécimens représentatifs par leur âge, leur beauté et autres éléments propres à les considérer comme éléments d’un patrimoine naturel essentiel.
Enfin et dans un contexte bien plus large, elles souhaitent initier une « recherche et une réflexion plus glo- bale » pouvant conduire, pourquoi pas, à un projet de loi. « Il faut réfléchir ensemble », soutient Marie-Hélène Scotto, avec l’approbation d’une assistance qui participe volontiers, certains soulignant la nécessité d’agir rapidement, une autre encore évoquant la protection de la biodiversité, un arbre étant, même mort, le lieu de vie de nombreuses espèces animales.
La conversation s’engage, des idées émergent, nourries des suggestions présentées par Judith Jahier-Hébert. Citons ainsi dans la continuité d’un recensement « l’augmentation de la liste d’arbres à planter dans le guide paysager du PLUi », la réalisation d’un « document pédagogique » incitatif présentant les intérêts qu’il y a à préserver les arbres ou encore la rédaction d’une « Charte de l’Arbre sur l’Ile de Ré ». Sur un petit papier distribué, chaque personne peut inscrire l’action dans laquelle elle souhaite s’investir.
Reste à ce collectif à prendre corps et à s’inscrire dans une réalité effective et dans le temps. Si une possible réflexion conduisant à un projet de loi paraît lointaine, un travail de proximité peut néanmoins être mené. La tâche est déjà assez vaste, induisant la construction d’un vrai projet nourri d’expériences existantes, de connaissances juridiques et d’une énergie pédagogique à toute épreuve, étant entendu que porter une vision différente n’est pas chose aisée, surtout lorsque des intérêts individuels sont en cause.
Des vertus de l’Arbre
Au-delà des considérations esthétiques, l’arbre est riche de vertus et de symboles qui ont traversé les âges. Pour ne citer que quelques exemples marqueurs de notre société confrontée à la dérive environnementale, Judith Jahiel-Hébert et Marie-Hélène Scotto ont rappelé quelques faits indubitables : – L’arbre absorbe le CO2 et produit de l’oxygène – C’est un climatiseur naturel – Il est à la fois générateur et draineur des eaux de pluie – C’est un refuge pour la biodiversité Ajoutons à tout cela qu’il est bon pour le bien-être et l’équilibre mental de l’être humain.
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