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L’île de Ré et La Rochelle, un destin lié… jusque dans les commémorations
Dans le cadre des 400 ans des guerres de religion, la Communauté de communes de l’île de Ré, la ville de La Rochelle et La Rochelle Université organisent un colloque scientifique, ouvert au grand public, du 27 au 29 novembre.
Si le terme de « colloque scientifique » (du 27 au 29 novembre prochains) peut paraître intimidant, l’évènement commémorant les 400 ans des guerres de religion s’adresse également au grand public. « Ce sont des conférences relativement pointues, mais plein de gens, qui s’intéressent à l’Histoire, peuvent s’y retrouver », commente Brice Samson, directeur du pôle services à la population à la CdC de l’île de Ré. Une partie « off » du colloque, plus « légère », touchera encore plus de monde, avec notamment la journée du 29 novembre (voir programme) qui se déroule entièrement sur l’île de Ré : un défilé « de mode » avec des costumes du 17ème siècle à la CdC (Saint-Martin), suivi d’une diffusion des « Trois Mousquetaires » à la Maline (La Couarde). Bref, il y en aura pour tous les goûts. Le colloque a la particularité de se dérouler de chaque côté du pont, les destins de l’île de Ré et de La Rochelle, deux places fortes du protestantisme, étant intimement liés.
Terres rebelles
En effet, entre 1562 et 1598, huit guerres de religion opposent catholiques et protestants, marquées par des épisodes sanglants comme la Saint-Barthélemy en 1572. L’édit de Nantes (1598) et le règne d’Henri IV apportent une trêve, mais son assassinat en 1610 ravive les tensions sous la régence de Marie de Médicis. L’île de Ré, La Rochelle, et l’Aunis se retrouvent au coeur du conflit. Ré, avec sa production de sel et de vin, soutient la puissance économique de La Rochelle, bastion protestant, et occupe une place stratégique pour le contrôle militaire de la mer des Pertuis. Avant le siège de La Rochelle de 1627-28, deux épisodes marquants des guerres de religion ont particulièrement marqué l’histoire de l’île de Ré : la bataille d’Ars de 1625 et celle du pont du Feneau du 8 novembre 1627 (voir encadré).
L’origine de ce colloque est à mettre au crédit des historiens locaux (Augeron, Even, Boucard entre autres) qui ont eu le projet, il y a quelques années, de publier un ouvrage à l’occasion des 400 ans des Guerres de religion. « Ils nous ont fait part de cette volonté, en insistant sur le fait que ça serait dommage de passer à côté de cet évènement », explique Brice Samson. Dans le même temps, Indalecio Alvarez, un journaliste passionné d’histoire locale, propose un projet « d’arc mémoriel » autour des batailles de l’île de Ré (lire notre article paru dans Ré à la Hune N° 280 : www. realahune.fr/le-site-de-la-bataille-dupont- du-feneau-au-coeur-dun-projetpharaonique/), proposant d’y associer le Musée de l’Armée à Paris1.
Jusqu’en 2028 !
Tout ce petit monde s’est réuni en novembre 2021 au Fort de la Prée à l’occasion d’un premier comité scientifique, qui avait pour but d’imaginer les commémorations autour des 400 ans des guerres de religion. Si les projets ont un peu divergé depuis2, le comité scientifique et le comité de pilotage ont continué à se réunir jusqu’à la mise en place de ce colloque. Et ce n’est que le début ! « Jusqu’en 2028, qui marquera l’anniversaire de la fin du siège de La Rochelle, il y aura tout un tas d’évènements pour commémorer ces guerres de religion », explique Brice Samson. Outre un ouvrage qui reprendra les actes du colloque scientifique (2025), de nombreuses expositions et conférences devraient voir le jour. A noter que sur l’île de Ré, des panneaux expliquant les deux principales batailles des guerres de religion viennent d’être installés à La Boire (bataille d’Ars) et à la Couarde (bataille du pont du Feneau).
Quant au projet de fouilles sur le site de la bataille du pont du Feneau (Lire notre article paru dans Ré à la Hune N° 280 : www.realahune.fr/le-site-de-la-batailledu- pont-du-feneau-au-coeur-dunprojet- pharaonique/), porté par l’association île de Ré Patrimoine, il a été présenté lors du dernier comité scientifique du 24 septembre dernier. Le dossier, déposé au Service régional de l’archéologie (SRA), dépendant du ministère de la Culture, est en cours d’instruction, avec une réponse de la DRAC en 2025. Pour ces premières « investigations non invasives »3, il faudra également l’autorisation de la DREAL, le champ de bataille se trouvant en site classé…
1 – Une convention a été signée entre la CdC de l’île de Ré et le Musée de l’Armée le 3 avril 2023.
2 – Indalecio Alvarez, souhaitant aller plus loin que le volet institutionnel de ces commémorations, a créé l’association Ile de Ré Patrimoine avec l’ambition d’organiser des campagnes de prospection sur le champ de bataille du pont du Feneau et de créer à terme un espace muséographique sur l’histoire des guerres de religion sur l’île de Ré.
3 – A noter que toute fouille archéologique, en dehors de ce cadre légal, est strictement interdite.
Les batailles de Ré
Dès 1620, le roi Louis XIII s’attache à restaurer l’autorité royale en réduisant les places fortes protestantes. L’île de Ré devient un champ de bataille, avec la bataille d’Ars du 16 septembre 1625, qui voit la victoire de l’armée catholique française contre les troupes protestantes de Soubise. Après la capitulation des huguenots, Louis XIII accorde néanmoins son pardon aux protestants Rétais. Si l’île de Ré est désormais sous autorité royale, elle reste une conquête fragile : Louis XIII ordonne la construction à la hâte de plusieurs fortifications dont la redoute du Martray, le fort de la Prée ou encore la citadelle de Saint-Martin, qui sont à peine terminés lorsque les hostilités reprennent deux ans plus tard.
En 1627, le duc de Buckingham obtient du roi Charles d’Angleterre les moyens de lever une armée afin de secourir les huguenots. Après un débarquement le 21 juillet à la pointe de Sablanceaux, le duc de Buckingham organise le siège de la citadelle de Saint-Martin (où sont retranchées les troupes protestantes), qui durera plusieurs mois. Voyant les renforts arriver pour porter secours à Toiras, Buckingham décide de lancer l’assaut sur la forteresse de Saint-Martin. C’est un échec cuisant. Le commandant en chef anglais n’a d’autre choix que de battre en retraite par Loix. Le 8 novembre 1627, l’armée royale de Louis XIII décide alors de poursuivre les Anglais et d’attaquer l’arrière de l’armée au milieu des marais, au passage du Pont du Feneau. Si Buckingham parvient à prendre la fuite, il s’agit d’un véritable massacre pour les troupes protestantes.
Cette victoire des troupes de Louis XIII sur l’île de Ré prive les huguenots et leurs alliés anglais d’un avant-poste crucial pour assurer le ravitaillement et le secours de La Rochelle, dernier grand bastion du protestantisme en France. Le siège et la chute de La Rochelle, l’année suivante (1627-28), en sont donc une conséquence directe.
Sources : Jdp 80, Les prémices du Siège de La Rochelle. Mathieu Delagarde. « Petite histoire de l’île de Ré », Marcel Delafosse. Editions Rupella, 1991
Demandez le programme !
Mercredi 27 novembre (Hôtel de ville de La Rochelle)
14h30-17h : le contexte du Grand Siège
– Catholicisme et protestantisme au début du XVIIème siècle
en Aunis et Saintonge (Didier Poton)
– Ré et La Rochelle, la situation politique, économique,
religieuse et sociale (Pascal Even)
– Philippe Duplessis-Mornay et La Rochelle (Didier Poton)
– Les Rochelais et la maîtrise de la mer, de la piraterie à la
course (1568-1625) (Mickaël Augeron)
– Bordeaux et la Gironde pendant les guerres de Religion
(Anne-Marie Cocula-Vaillières)
Jeudi 28 novembre (Musée maritime de La Rochelle)
9h-12h30 : Contexte international et opérations militaires,
terrestres et navales.
– Les relations internationales (Pascal Even)
– La Rochelle, Ré, Terre-Neuve et la Nouvelle-France
(Mickaël Augeron)
– Rochelais et Rétais aux Antilles (Stéphanie Dargaud)
– L’intervention anglaise : le siège de Saint-Martin et la
défaite de Buckingham (1627) (Jacques Boucard)
– D’un siège à l’autre (1627-1628) : le Grand siège de La
Rochelle (Pascal Even)
– Clément Métezeau et la construction de la digue de
Richelieu (Emmanuelle Loizeau)
– Les corsaires méditerranéens venus à La Rochelle
(Philippe Chareyre)
14h-17h : armes et propagande/ Les conséquences du
Siège (1628-85)
– Les armes offensives et défensives dans les collections du
musée de l’Armée (Olivier Renaudeau)
– « La Défaite des Anglais en l’île de Ré par l’armée
française le 8 novembre 1627 » de Laurent de La Hyre.
Sources visuelles et narratives d’un tableau singulier
(Sylvie Le Ray-Burimi)
– Une arme de propagande : Le Diable et la diablesse de
Rochelle (1628) (Mickaël Augeron)
– Le Grand siège, construction d’un évènement médiatique
européen (1627-1629) (Muriel Hoareau)
– La Rochelle-Ré dans la reconquête catholique (Pascal Even)
– La ville de La Rochelle et l’île de Ré d’un point de vue
économique, social et institutionnel (Mickaël Augeron,
Jacques Boucard, Pascal Even)
– Les fortifications de La Rochelle et de l’île de Ré (Nicolas
Faucherre et Jean-Claude Bonnin)
– Du démantèlement des fortifications de La Rochelle à la
reddition de Montauban (Pierre-Jean Souriac)
Vendredi 29 novembre (La Maline, La Couarde-sur-Mer)
9h-12h30 : les héritages mémoriels et la construction
d’un récit
– Les fausses légendes du siège dans l’Histoire (Pascal Even)
– L’imaginaire du siège vu au travers des manuels scolaires
(Vincent Martin)
Tarifs : 10€ / jour, 35€ / 2 jours (déjeuner compris)
et 45€ / 3 jours (déjeuner compris).
LES « OFF » DU COLLOQUE
(gratuit, réservation obligatoire)
Mercredi 27 novembre (Temple de La Rochelle)
18h-19h30 : visites en petits groupes du temple protestant
et du musée rochelais d’histoire protestante.
Jeudi 28 novembre (Maison de l’Etudiant à La Rochelle)
18h-19h : architectures de pouvoir à La Rochelle avec une
immersion 3D dans les principaux monuments de la Ville
au XVIIème siècle.
Vendredi 29 novembre
(Communauté de Communes de l’île de Ré)
14h30-17h : « Make up, on s’apprête ! Plongée au coeur de
la mode du XVIIème siècle ». Présentation de costumes du
XVIIème siècle confectionnés par La Corneille Distinguée,
au siège de la CdC à Saint-Martin.
18h-19h : Projection d’une adaptation du roman « Les
Trois Mousquetaires » d’Alexandre Dumas à La Maline
(La Couarde-sur-Mer).
Réservations obligatoires pour le colloque et les
«off» sur patrimoine-iledere.mapado.com
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